Le rôle de l'assistante sociale dans la prise en charge d'un malade Alzheimer


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Le rôle de l'assistante sociale dans la prise en charge d'un malade Alzheimer
Le rôle de l'assistante sociale dans la prise en charge d'un malade Alzheimer

Comment faire valoir dans l’urgence tous les droits du patient Alzheimer et respecter son choix de lieu de vie, alors même qu’il n’est plus en mesure de donner son consentement éclairé? Dans un tel contexte, le travail de l’assistante sociale est primordial. 

Une majorité de patients Alzheimer font partie des maisons de retraite et EHPAD 

Force est de constater qu’une majorité de patients Alzheimer font désormais partie des principaux résidents de maisons de retraite médicalisées et EHPAD de France. Actuellement, certains établissements abritent plus de 60% de personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer. Pourtant, 70% des malades Alzheimer demeurent à domicile, bénéficiant dans le meilleur des cas d’un panel d’aides spécifiques : aide-ménagère, soins infirmiers, aide-soignante, garde-malade, lit médicalisé, portage de repas… et du soutien financier apporté par l’allocation personnalisée d’autonomie. Malgré toutes ces mesures, le reste à charge pour la famille reste encore trop élevé, faisant de cette maladie une « double injustice ». De plus, bien souvent l’aidant familial, conjoint ou enfant, croule sous la surcharge de travail quotidien et les problèmes psychologiques qu’engendrent de telles situations d’épuisement. Au détriment de sa propre santé, l’aidant doit faire face, coûte que coûte. Parfois au risque de négligences graves, voire de drames familiaux, comme ceux fréquemment rapportés par les médias.

Dans un tel contexte, le travail de l’assistante sociale est primordial

Comment faire valoir dans l’urgence tous les droits du patient Alzheimer et respecter son choix de lieu de vie, alors même qu’il n’est plus en mesure de donner son consentement éclairé ? A ces questions cruciales, notre assistante sociale, Nastasia Balandier, a accepté de répondre. Voici ses explications :

Nastasia Balandier est assistante sociale depuis 5 ans dans une clinique de rééducation fonctionnelle comprenant un service de soins de suite gériatrique de 45 lits, et un service de médecine physique et réadaptation d’une capacité d’accueil de 30 lits et 20 en accueil de jour. Sa fonction : Assurer le lien entre la clinique, la famille et les partenaires extérieurs pour organiser et préparer l’entrée du patient au sein d’un EHPAD, particulièrement adapté aux malades d’Alzheimer…

L’assistante sociale doit faire valoir, souvent dans l’urgence, tous les droits du patient et constituer  un dossier solide pour une entrée en EHPAD.

Comment procédez-vous ?

Je procède tout d’abord à l’évaluation des besoins du patient tant au niveau médical que social. Pour ce faire, l’évaluation sociale et les réunions de synthèse hebdomadaires me permettent de recueillir l’avis de l’équipe pluridisciplinaire qui est primordiale à la prise en charge globale du patient. Ensuite, je rencontre obligatoirement la famille pour les inclure dans le projet via une écoute, des conseils, je les oriente et recherche avec eux un établissement médicalisé adapté à la dépendance du patient, au budget mais aussi au secteur géographique souhaité. J’informe régulièrement patient et famille sur l’avancée des recherches et constitue les dossiers d’aide au financement des EHPAD. Dans la mesure où le patient est isolé, nous nous substituons à la famille et effectuons les démarches de « A à Z » jusqu’à l’accompagnement du patient dans son futur lieu de vie.

Quels sont les problèmes spécifiques rencontrés par l’assistante sociale lorsqu’il s’agit d’un patient Alzheimer ?

Le patient Alzheimer peut présenter d’importants troubles cognitifs susceptibles d’altérer sa capacité de décision et son jugement et par conséquent altérer ses capacités à décider ou non d’entrer en établissement. Il se peut que le patient présente une « anosognosie » (NDLR : terme un peu barbare, venant du grec nosos/maladie et gnosie/connaissance, l’anosognosie est un symptôme caractérisant la méconnaissance, voire le déni, par un malade de la maladie dont il est atteint alors que celle-ci apparaît de façon évidente). Il n’a donc pas conscience de ses incapacités intellectuelles ou motrices, il est difficile de lui faire comprendre que le projet d’EHPAD est le plus sécurisant comme projet de sortie de la clinique. Certains patients sont dans le déni, d’autres n’ont aucune valeur de l’argent, aucune notion de l’espace et du temps, ce qui complique les explications à fournir au patient quant au projet, à son financement et à sa nécessité. Enfin la famille peut, elle aussi, mettre des freins au placement. En effet, quand il y a un conjoint aidant ou un enfant au domicile, celui-ci même épuisé physiquement, moralement et psychologiquement par la lourde prise en charge du patient, se culpabilise de l’entrée en institution, se sentant impuissant. Il est important d’adapter son discours tout en rendant le patient acteur de son projet. Pour ce faire, la psychologue est aussi une aide à l’acceptation du projet aussi bien pour le patient que pour la famille. Enfin, rares sont les patients dont le jugement est altéré qui bénéficient d’une mesure de protection juridique (sauvegarde de justice, curatelle simple curatelle renforcée ou tutelle), ce qui complique les démarches au niveau financier.

Quels sont les délais requis entre la demande et l’entrée en EHPAD ?

Nous n’avons malheureusement souvent que le temps de l’hospitalisation pour trouver une maison adaptée. La moyenne de séjour en soins de suite est d’un mois, mais bien souvent les démarches de maisons de retraite sont longues. Il faut pouvoir trouver rapidement des solutions adaptées aux souhaits familiaux du patient et au budget, sans compter les délais d’attente dans l’instruction des dossiers d’aides financières. Cette durée se voit souvent prolongée quand les démarches n’ont pas été entreprises avant le séjour du patient dans notre établissement.

Comment abordez-vous les problèmes de mise sous tutelle ?

Quand le patient a de la famille, le rôle de l’équipe médico-sociale est d’interpeller la famille sur la nécessité d’une mise sous protection juridique. Il faut que cette question soit traitée sur les deux plans : les médecins doivent évaluer puis expliquer les incapacités du patient à gérer son patrimoine, voire à prendre des décisions. De son côté, l’assistante sociale conseille, oriente et guide les familles, voire instruit elle-même une demande de protection juridique, via le procureur de la République. En ce qui concerne le patient, c’est parfois difficile pour lui de se voir déposséder de son pouvoir de gestion de sa vie financière.

Comment respecter le choix de lieu de vie du patient lorsque celui-ci n’est plus en mesure de donner son consentement éclairé sur la question ?

Le discernement du patient atteint de la maladie d’Alzheimer à un stade léger n’est pas forcément altéré. Le patient devient dépendant progressivement, de manière plus ou moins importante, et les décisions médicales dépendent de la volonté, de l’état, des désirs du patient. Un droit à agir ne peut se concevoir sans la reconnaissance du respect des choix du patient dans tous ses actes. Aujourd’hui, il faudrait dans l’idéal respecter les préférences du patient tout en recherchant son avis, ses désirs, s’en tenir aux préférences et aux valeurs qui étaient celles de la personne lorsque celle-ci était encore capable d’autonomie. On peut alors se référer aux directives anticipées (s’il y en a, c’est rare) ou recourir à des histoires de vie mais bien souvent la culture, la culpabilité des proches et l’importante perte d’autonomie du patient nous empêchent d’agir selon une norme.

Comment la famille parvient-elle au bout du compte à régler la facture mensuelle de l’EHPAD?

Il existe quand le patient n’a pas les moyens de régler seul le prix de l’hébergement, des aides sociales comme l’APA en établissement qui permet de financer la partie dépendance de la maison de retraite et l’aide sociale à l’hébergement qui permet de financer la partie hébergement. Il est possible de faire valoir les APL également. Nous rencontrons des difficultés dans l’adhésion des familles au dossier d’aide sociale à l’hébergement qui est sur succession. Nous avons pour mission d’orienter et de guider les familles dans l’instruction de ces dossiers, voire, quand le patient est isolé, de l’instruire.

Propos recueillis par Isabelle Azeroual

Chères AS, cette rubrique vous est dédiée. Faites-nous part de vos témoignages, de vos difficultés quotidiennes sur le terrain, et de vos remarques pour améliorer la prise en charge des personnes âgées hébergées en Ehpad ou maison de retraite. Retraite Plus se fait un devoir de publier les points les plus pertinents dans ses colonnes...écrivez nous à l’adresse suivante : lecteurs@retraiteplus.fr

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